Le packaging nouveau

Marie-Claude Lortie
Chronique

J’achète très souvent des produits parce que j’aime leur emballage. Un format pas banal, des couleurs ou une absence de couleur, de la typo inspirante. Ça peut être aussi rétro qu’une conserve de sirop d’érable traditionnelle ou absolument minimaliste comme les parfums suédo-canadiens Byredo. Il peut y avoir des tons vifs comme ceux des jus, des bières et même du gin Loop, ou le tout peut être sombre comme les bougies LVNEA. Je n’ai pas de style préféré. Juste une envie de quelque chose d’intéressant.

Parfois, je ne rachète pas ledit produit, parce que j’ai été déçue. Mais je prends souvent des risques. Parce que les emballages viennent me chercher.

Et en ce moment, je me régale. Parce que les produits québécois connaissent, selon moi, un âge d’or du packaging.

Je pense à la bière Boldwin ou Coaticook, aux produits pour bébé Enamour, au gin Cirka, aux tartinades Logan Petit Lo ou Allo Simone. En fait, à toutes les nouvelles marques de bière, de gin, de vodka, de vin…

Il n’y a absolument plus rien d’ennuyeux du côté des produits d’ici, au contraire. Ils se démarquent magnifiquement lorsqu’ils flanquent les designs américains sur les tablettes de nos supermarchés ou de toute grande surface. Ou dans nos maisons.

Ma nouvelle habitude post-confinement ? Arracher les étiquettes de certains contenants – souvent d’origine américaine – aux designs ennuyeux pour les re-remplir dans des épiceries en vrac.

Et ne garder que les étiquettes de produits québécois que j’aime.

Mon chouchou : je crois que c’est l’ensemble de l’œuvre de la maison Nadeau Branding pour les produits Bouchard Artisan Bio. 😄

« C’est très difficile, risqué, quand on a déjà une identité visuelle forte et une loyauté des clients, de changer beaucoup les emballages. »

-Benoit Giguère

Les paquebots que sont les grandes grandes marques ne virent pas sur un 10 cennes.

Mais les petits nouveaux, oui.

La créativité des packaging touche donc les récents arrivés. La Pinte, du côté du lait, Oneka, côté savons, État de choc, côté chocolat, Cirka, côté vodka…

Denis Belair, fondateur de la marque de bière Boldwin, n’a même pas fait d’étude de marché avant de définir les emballages épurés de ses bières biologiques qui sont absolument magnifiques.

Vous les avez sûrement remarqués.

Un oiseau sur un fond dépouillé. Un bateau. Un mouton. Tons légèrement pastel. On est aux antipodes des esthétiques vaguement médiévales, vaguement viking, des bières de microbrasseries de premières générations.

Bélair n’a même pas travaillé avec une agence. Juste un artiste graphiste, Eliot Lafrenière.

« Je voulais juste que les images créent une émotion cohérente avec la bière », m’a-t-il expliqué au téléphone lundi.

Quand on achète un tel produit, dit-il, 50 % de la décision est en lien avec le contenu et 50 % avec le contenant. Le but était de créer un ensemble, entre le dessin, le nom de la bière – Caux, du nom du maître brasseur de la maison, La Saison est courte, Fleuve, Champs d’eau, etc. – et l’expérience en bouche.

« Je n’ai rien à voir avec les autres, dit-il. Et j’en suis vraiment fier. »

***

Benoit Giguère a raison.

Cette nouvelle créativité n’est pas encore généralisée et ces nouveaux repères esthétiques sont encore réservés à des produits dont beaucoup sont encore peu distribués.

Mais j’ai espoir qu’ils agissent comme locomotive pour traîner tous les autres derrière eux.

Il était temps que la créativité québécoise touche aussi les emballages, même si on en veut moins.

Ça sera dans ce secteur comme dans le reste.

Donnez-nous moins d’emballages jetables et donnez-nous du packaging de qualité. Beau. Intéressant. Intelligent.

L’avenir devrait être là.